Le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), responsable du sida, touche près de 41 millions de personnes dans le monde.
Dernière mise à jour le 22 août 2025
Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), responsable du sida, touche près de 41 millions de personnes dans le monde. La recherche poursuit ses efforts pour mieux comprendre ce virus et pour développer de nouveaux outils visant à mettre fin à l’épidémie.
Le syndrome d’immunodéficience acquise (sida) est dû à l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) qui détruit les défenses immunitaires. En 2024, 40,8 millions de personnes vivaient avec ce virus et 630 000 sont mortes de maladies liées au sida, à l’échelle mondiale.1
À ce jour, si cette infection ne peut être guérie, elle peut être contrôlée efficacement par l’association de plusieurs traitements antirétroviraux (multi-thérapies). Différentes approches préventives et curatives permettent en outre de réduire les risques de transmission du virus et de diminuer le nombre de nouveaux cas d’infections, en attendant un traitement qui permettra enfin d’éliminer complètement le virus de l’organisme des personnes infectées.
Dossier réalisé en collaboration avec l’Inserm et VIH.org en 2024. Mise à jour réalisée par l’ANRS MIE en 2025.
La plus ancienne infection d’un humain par le VIH‑1 documentée est celle d’un marin, découverte à partir de prélèvements sanguins datant de 1959. Selon l’arbre phylogénétique établi en comparant plusieurs centaines de virus issus de différentes souches, l’ancêtre du VIH‑1 a dû apparaître en Afrique dans les années 1920–30. L’humain a probablement été contaminé à plusieurs reprises depuis lors, via la consommation de viande de chimpanzé ou des morsures de ces animaux.
Le sida a été identifié pour la première fois en 1979 aux États -Unis. Le VIH-1 a été isolé en 1983.2
Découverte en 1986, la souche VIH‑2 dérive elle aussi d’un virus simien. VIH‑1 et VIH‑2 présentent des différences moléculaires. En France, plus de 98 % des infections sont dues au VIH‑1. Le VIH‑2 est moins virulent, moins transmissible et sévit principalement en Afrique de l’Ouest.
Depuis le début de l’épidémie, dans monde, plus de 85 millions de personnes ont été infectées par le VIH, et plus de 44 millions sont décédées des conséquences du sida.3
En 2023, environ 200 000 personnes vivaient avec le VIH en France.4 Le nombre de diagnostics, qui avait diminué jusqu’en 2020, a atteint en 2023 la valeur moyenne de 937, retrouvant le niveau de 2019.La majorité des personnes ignoraient leur séropositivité.5 Or les personnes qui ne connaissent pas leur statut vis-à-vis de cette infection et celles qui n’ont pas accès aux traitements contribueraient à 80 % des nouvelles infections par le VIH.
Chaque année en France, environ 5 000 personnes découvrent leur séropositivité pour le virus du sida, un chiffre en diminution depuis 2012 (- 11 % à ‑ 21 %).4 En 2023, il a été estimé à 5 500.4 Parmi les personnes qui ont découvert leur séropositivité en 2023, 55 % étaient hétérosexuelles (340 % nées à l’étranger et 15% en France), 40 % étaient des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) ou bisexuels (26 % nés en France et 14 % à l’étranger), 2 % des personnes trans infectées par rapports sexuels et 1 % des usagers de drogues injectables. Moins de 1 % de ces cas étaient des enfants de moins de 15 ans, principalement contaminés à la naissance par leur mère qui ne connaissait pas son statut sérologique ou n’avait pas été suivie.4
Une augmentation régulière en France du nombre de personnes vivant avec le VIH est observée depuis le début de l’épidémie, en raison du nombre annuel de nouvelles contaminations toujours supérieur à celui du nombre de personnes séropositives qui décèdent chaque année.5
Le VIH peut se transmettre par le contact étroit et non protégé avec certains liquides biologiques d’une personne infectée :
Le risque de transmission à un tiers existe dès le stade précoce de l’infection et persiste tant que la personne vivant avec le VIH n’est pas traitée de manière efficace. Le risque de transmission disparaît quand la charge virale, c’est-à-dire le nombre de copies du virus retrouvé dans un millilitre de sang, est contrôlée et devient indétectable. Le risque réapparaît si le traitement est interrompu et que la charge virale ré-augmente.
En l’absence de traitement, le taux de transmission du VIH de la mère à l’enfant était de plus de 25 %. Mais il se rapproche désormais de zéro en France, grâce au traitement antirétroviral administré aux femmes séropositives pendant leur grossesse et au nouveau-né après l’accouchement.
Par ailleurs, grâce à la sélection des donneurs et à la recherche des anticorps et du virus dans les dons de sang, le risque de transmission par transfusion sanguine est extrêmement faible. De la même façon, les protocoles en vigueur rendent extrêmement faible le risque de transmission à des professionnels de santé.
Le VIH est un rétrovirus qui infecte des cellules immunitaires présentant la protéine CD4 à leur surface, principalement les lymphocytes T CD4+ (mais pas exclusivement). Une fois à l’intérieur de ces cellules, le virus utilise leur machinerie pour se multiplier et être en mesure de se diffuser dans l’organisme. Dès le début de l’infection, il s’accumule dans certaines cellules et forme en quelques jours – voire quelques heures – des réservoirs de virus « dormants » qui persistent à vie et peuvent se réveiller à tout moment.
En l’absence de traitement, le virus entraîne la disparition des lymphocytes T CD4 nécessaires au bon fonctionnement du système immunitaire. La sévérité de la maladie s’évalue entre autres par la quantité de cellules CD4 restantes dans l’organisme. Le stade le plus avancé de l’infection à VIH est le syndrome d’immunodéficience acquise, ou sida. Sans traitement, il apparaît entre 5 et 10 ans après l’infection, bien que ce délai varie fortement selon les personnes.
Au cours des premières semaines suivant l’infection (primo-infection, période de 5 à 30 jours), certaines personnes sont asymptomatiques, d’autres présentent de manière transitoire un syndrome de type grippal : fièvre, éruption cutanée, fatigue, diarrhée.3,5
S’ensuit une longue phase sans signe apparent (période asymptomatique), au cours de laquelle le virus qui est présent dans l’organisme peut être transmis en absence de traitement.5
Le VIH se transmet plus facilement dans les premiers mois qui suivent l’infection, mais de nombreuses personnes ne sont pas conscientes de leur statut tant qu’elles n’ont pas atteint un stade plus avancé.3
Sans traitement approprié, le VIH affaiblit progressivement le système immunitaire (stade sida).3,5 Au cours de cette affaiblissement, d’autres signes et symptômes peuvent apparaître : lymphadénopathie (augmentation de ganglions lymphatiques), amaigrissement, fièvre, diarrhée, toux.3
Le syndrome d’immunodéficience acquise (sida) est le stade avancé de l’infection à VIH. Il correspond à l’apparition de certains cancers et d’infections opportunistes liées à l’affaiblissement du système immunitaire comme la pneumocytose pulmonaire, la tuberculose, la toxoplasmose cérébrale, la candidose œsophagienne, la maladie de Kaposi et les lymphomes non hodgkiniens…
Le VIH peut provoquer l’aggravation d’autres infections, comme l’hépatite B, l’hépatite C et la mpox.3
Les différents stades de l’infection
Le taux de lymphocytes T CD4 et la charge virale (nombre de copies de virus dans le sang) permettent d’évaluer la progression de l’infection. Sachant qu’un taux normal de lymphocytes T CD4 se situe entre 600 et 1 200/mm3, l’infection est dite :
En France le diagnostic d’une infection par le VIH passe par l’utilisation d’un test sanguin dit « de 4e génération », réalisé en laboratoire d’analyses. Il associe la recherche des anticorps contre le VIH‑1 et le VIH‑2 et celle d’une protéine associée au virus, l’antigène P24. En cas de suspicion d’infection très récente (moins de 3 semaines), la recherche directe du virus est possible. Ces tests peuvent être réalisés sur prescription médicale, mais également directement dans les laboratoires d’analyse médical sans ordonnance.
Le test rapide d’orientation diagnostique (TROD) est réalisé à partir d’une goutte de sang. Il permet d’avoir un résultat en 5 à 30 minutes maximum. Ces tests peuvent être moins performants en cas d’infection récente car ils ne dépistent que les anticorps. Ils sont réalisés par certaines associations, dans un environnement médicalisé ou non, ainsi que dans les centres de dépistage anonyme et gratuit. Un résultat positif ou douteux devra être confirmé par un test sanguin de 4e génération.
Des autotests sont également disponibles en France. Leur utilisation est comparable à celle des tests rapides d’orientation diagnostique et permet de se dépister seul à son domicile. Ces tests détectent des anticorps anti-VIH en une trentaine de minutes à partir d’une goutte de sang ou de la salive. Là encore, ces autotests sont moins performants en cas d’infection récente et un résultat positif devra être confirmé par un test sanguin de 4e génération.
Un diagnostic souvent trop tardif en France
En 2022, 43 % des diagnostics étaient tardifs, réalisés chez des personnes dont l’immunité était déjà altérée (avec moins de 350 T CD4 par mm³), dont 28 % avaient même déjà atteint le stade avancé de l’infection (avec moins de 200 T CD4 par mm³). Seules 30 % des découvertes de séropositivité pour le VIH chez les adultes correspondaient à des diagnostics précoces, c’est-à-dire réalisés dans les 6 mois qui suivent l’infection par le VIH.
Or la précocité du diagnostic et de la mise en route d’un traitement est cruciale pour obtenir un bon contrôle de l’infection, réduire le risque de transmission du virus et permettre aux personnes concernées de vivre en bonne santé aussi longtemps que possible.
Même s’il existe des traitements efficaces, la guérison n’est pas possible à ce jour.
Le traitement de référence en cas d’infection par le VIH est une thérapie antirétrovirale qui associe deux ou trois médicaments antirétroviraux (ARV), voire plus. Aucun traitement ne permet aujourd’hui de guérir l’infection, mais cette multithérapie empêche la réplication du virus dans l’organisme.
En France, la multithérapie antirétrovirale est recommandée dès le diagnostic, quel que soit le stade de l’infection. Elle permet de rendre la charge virale indétectable dans le sang et les sécrétions génitales, réduisant ainsi le risque de transmission du virus à un tiers : une personne dont la charge virale est indétectable dans le sang est aujourd’hui considérée comme non contaminante, que ce soit par voie sexuelle ou par voie materno-fœtale. Ce traitement permet en outre au système immunitaire de se renforcer, diminuant ainsi le risque de complication sévère (infections opportunistes, cancers).
Toutefois, malgré leur efficacité, les traitements disponibles ne permettent pas d’éliminer les réservoirs de virus constitués dans certaines cellules immunitaires au cours des premiers jours de l’infection. Le traitement doit donc être poursuivi à vie pour contrôler durablement l’infection.
Globalement, une prise en charge très précoce garantit un bon contrôle de l’infection : lorsque le traitement est démarré suffisamment tôt et que le taux de T CD4 est restauré, l’espérance de vie semble équivalente à celle de la population générale, dans la limite du recul dont disposent les experts à ce jour. En revanche, un dépistage tardif, à un stade où le système immunitaire est déjà altéré (taux de T CD4 inférieur à 350 mm3), complique la prise en charge et la restauration immunitaire : 35 % des personnes actuellement traitées gardent un taux de T CD4 inférieur à 500/mm3 car il faut des années pour qu’une personne diagnostiquée à un stade avancé parvienne à ce taux. Pour ces personnes, les complications et la mortalité associées à l’infection sont supérieures à celles observées chez les patients dont l’infection est bien contrôlée.
Plusieurs outils sont disponibles pour une prévention combinée. Le port du préservatif lors de rapports sexuels, la désinfection de matériel contaminé ou encore l’emploi de matériel à usage unique pour les usagers de drogues sont d’excellents moyens de prévention. Les antirétroviraux utilisés chez les personnes exposées viennent compléter l’arsenal de ce qu’on appelle la prévention combinée.
En France, un test de dépistage de l’infection par le VIH est systématiquement proposé aux femmes enceintes. En cas de séropositivité, un traitement antirétroviral est administré aux femmes pendant leur grossesse et à leur nouveau-né après l’accouchement : grâce à ce dispositif, il n’y a quasiment plus de transmission mère-enfant du VIH en France.
Concernant l’allaitement au sein par une femme vivant avec le VIH, la France a fait évoluer ses recommandations de bonne pratique en mai 2024 : il est désormais possible d’envisager l’allaitement sous certaines conditions strictes de contrôle de la charge virale, de suivi médical mensuel, et de traitement préventif pour l’enfant (pour éviter la contamination si la charge virale maternelle augmente ou en cas de présence de cellules infectées dans le lait).
Aujourd’hui un traitement antirétroviral est instauré dès le diagnostic d’une infection par le VIH pour réduire en quelques semaines la réplication du virus au niveau le plus bas possible. Or une personne séropositive sous traitement antirétroviral efficace avec une charge virale très basse ne transmet pas le VIH. C’est sur cette équation « virus indétectable = virus intransmissible » que se fonde l’approche « TasP » – pour treatment as prevention.
Cette stratégie est extrêmement efficace comme l’ont observé puis démontré plusieurs études, aussi bien dans le cadre de rapports hétérosexuels (étude HTPN052) que dans celui des rapports entre hommes (étude Partner).
La PrEP est un traitement antirétroviral pris pour éviter d’être infecté par le VIH. Elle est destinée aux personnes séronégatives, avant une exposition au virus. Ce mode de prévention est très efficace, les rares échecs de la PrEP étant presque toujours liés à des défauts d’observance du traitement ou à son arrêt prématuré.
La PrEP peut être prise quotidiennement (un comprimé par jour) ou « à la demande ». Dans ce dernier cas, il faut prendre deux comprimés entre deux heures et 24 heures avant le rapport sexuel à risque et un comprimé par jour les deux jours suivants. L’efficacité de la prise à la demande a été montrée dans les études ANRS IPERGAY et ANRS Prévenir. Une forme injectable de la PrEP, qui ne nécessite d’être injectée qu’une fois toutes les huit semaines, devrait prochainement être disponible en France.
La PrEP peut être proposée à toute personne active sexuellement qui peut en avoir besoin. Elle est prise en charge à 100 % par l’assurance maladie. Depuis 2021, elle peut être prescrite après un bilan biologique par tout médecin exerçant en ville ou à l’hôpital. Elle est assortie d’un suivi réalisé tous les trois mois. Elle ne protège pas des autres infections sexuellement transmissibles (IST), mais un dépistage régulier et systématique du VIH et des autres IST est réalisé dans le cadre de ce suivi régulier.
En France, 59 326 personnes avaient utilisé la PrEP au premier semestre 2024 (soit 6 580 personnes de plus par rapport au premier semestre 2023) et environ 103 400 (soit environ 18 000 de plus qu’en juin 2023) l’avaient fait au moins une fois depuis son autorisation en 2016.6 Malgré cette poursuite de l’augmentation continue de l’utilisation de la PrEP observée depuis 2016, le nombre de nouvelles personnes y ayant recours entre juillet 2023 et juin 2024 a baissé de 8 % par rapport à l’année précédente. Ces chiffres montrent pour la première fois un infléchissement dans la progression de son utilisation la dernière année. 6
Cette solution de prévention est encore mal connue du grand public. Utilisée très majoritairement par les HSH, elle n’atteint pas encore les autres populations les plus exposées, comme les hommes et les femmes migrants.
La circoncision réduit le risque de transmission hétérosexuelle du VIH chez l’homme de 60 % et elle est également bénéfique pour les femmes. Les études menées en Afrique qui ont révélé ces chiffres ont conduit l’Organisation mondiale de la santé à recommander la circoncision médicale sur la base du volontariat dans les régions de forte prévalence de l’infection, principalement en Afrique australe et de l’Est. Une étude de mise en place de cette mesure sur le terrain, conduite par l’ANRS MIE, a montré une bonne acceptation de cette pratique dans la population masculine et confirmé la baisse des nouvelles infections.
L’ONUsida vise à la fin de la transmission du VIH au niveau mondial en 2030, en atteignant les objectifs appelés « 95–95-95 » d’ici 2025, à savoir :
Ces objectifs ambitieux sont rendus réalistes par les progrès en matière de médicaments, de prévention (PrEP, TasP) et d’accès au dépistage et aux soins, mais ils restent dépendants de politiques volontaristes de santé publique.
En France, en 2021, 96,1 % des personnes chez lesquelles une infection à VIH avait été diagnostiquée bénéficiaient d’un traitement antirétroviral, et 93,3 % d’entre elles avaient une charge virale indétectable (moins de 50 copies par mm3). Mais le pourcentage des personnes infectées et diagnostiquées n’était estimé qu’à 86 % en 2018 (dernier chiffre disponible). Il est cependant possible que la situation ait évolué depuis, notamment avec le dispositif VihTest, expérimenté avec succès sous le nom Au labo sans ordo. Depuis le 1er janvier 2022, il permet en effet d’effectuer un dépistage de VIH dans tous les laboratoires d’analyses biologiques en France sans avance de frais, sans ordonnance et sans rendez-vous. L’accès à la PrEP pourrait également avoir contribué à un meilleur dépistage, en plus de son efficacité à prévenir les nouvelles infections. La prescription de la PrEP par tout médecin, telle que mise en place le 1er juin 2021, a simplifié le parcours des personnes concernées et devrait renforcer l’accès à cet outil de prévention qui s’inscrit dans une démarche de santé sexuelle globale.
D’autres facteurs peuvent au contraire avoir détérioré la situation, voire retardé l’accès au diagnostic, comme la précarité et l’insécurité administrative croissantes des migrants qui arrivent sur le territoire.
Aujourd’hui, en finir avec la transmission du VIH demeure un défi. Il faut améliorer le recours à tous les moyens de prévention et au dépistage, pour que les personnes atteintes sans le savoir puissent avoir accès à un traitement et ne risquent plus de transmettre l’infection.
Chez les personnes bien suivies, le contrôle de l’infection par le VIH est aujourd’hui performant. Mais aucun médicament ne permet d’éradiquer le virus de l’organisme d’un malade. Plusieurs pistes de recherche sont étudiées pour trouver une solution qui permettra de guérir les patients (ce qu’on appelle en anglais le cure) : la thérapie cellulaire pour greffer des cellules immunitaires résistantes à l’infection, des vaccins thérapeutiques pour stimuler le système immunitaire contre le virus, ou encore des stratégies pour cibler les réservoirs de virus dormants. Les patients pourraient alors interrompre leur traitement au bout de quelques mois ou années, sans risquer la rechute.
La recherche fondamentale se poursuit, contribuant à une meilleure connaissance du VIH et de la pathologie sida, ainsi qu’au développement de stratégies pour enrayer l’infection. Les chercheurs étudient les mécanismes moléculaires mis en jeu dans les différentes étapes du cycle viral, les réponses immunologiques innées et acquises contre le VIH et, en particulier, les événements qui se déroulent au cours de la phase précoce de l’infection et de la progression de la maladie. Des chercheurs ont par exemple montré qu’en cas d’infection, le système immunitaire est suractivé, faisant perdre aux lymphocytes leur efficacité à éliminer le virus. Le VIH induit également une inflammation chronique contre laquelle il semble pertinent de lutter puisqu’elle est associée à un risque accru de complications.
Pour guérir les patients, les chercheurs veulent parvenir à induire une immunité qui permettrait d’éliminer le virus, ou au moins de contrôler l’infection sans qu’il soit nécessaire de prendre un traitement à vie. Pour cela ils s’intéressent de près à des populations de patients qui résistent à l’infection, spontanément ou après interruption d’un traitement.
Les VIH contrôleurs « spontanés »
Moins de 1 % des personnes contrôlent naturellement l’infection par le VIH, sans intervention thérapeutique : ils conservent une charge virale indétectable ou très modérée pendant plus de dix ans, et leur taux de lymphocytes T CD4 reste élevé. Les chercheurs tentent d’identifier les mécanismes qui permettent à ces personnes de résister au virus. Ils ont déjà montré qu’elles possèdent des lymphocytes T CD8 particulièrement efficaces, qui reconnaissent les cellules infectées par le VIH et les suppriment. Une résistance des cellules ciblées par le VIH dans leur organisme, limitant leur infection par le virus, a également été mise en évidence. Ces propriétés exceptionnelles seraient d’origine génétique.
Les VIH contrôleurs post-traitement
Un petit nombre de personnes traitées précocement pendant 3 à 7 ans et qui ont interrompu leur traitement sont devenues « contrôleuses » du virus : elles ne rechutent pas dans les années qui suivent l’arrêt du traitement antirétroviral et leur charge virale reste indétectable pendant au moins une dizaine d’années, même après seulement trois ans de traitement.
Les thérapies cellulaires développées dans le cadre du traitement des infections à VIH visent à repeupler le système immunitaire des patients infectés avec des lymphocytes T génétiquement modifiées pour résister au virus. Cette idée a émergé après la guérison fonctionnelle du « patient de Berlin », Timothy Brown, en 2009. Atteint d’une leucémie, il a reçu deux greffes de cellules de moelle issues d’un donneur qui présentait une délétion sur le gène CCR5. Or cette mutation est connue pour rendre presque impossible l’infection par le VIH. Cette greffe a permis au patient de Berlin d’interrompre son traitement antirétroviral en conservant un contrôle durable de l’infection par le VIH. Deux autres patients, un à Londres, l’autre à Düsseldorf, ont aussi guéri du VIH à la suite d’une greffe.
Bien sûr, le cas de Timothy Brown reste extraordinaire et le traitement qu’il a reçu ne peut pas être appliqué à toutes les personnes vivant avec le VIH. Mais il a inspiré la mise au point d’un essai clinique au cours duquel des patients ont été traités par l’injection de leurs propres lymphocytes T CD4, préalablement modifiés pour qu’ils n’expriment plus le gène CCR5. Malheureusement, à ce jour, ce protocole n’a pas donné de résultats tangibles.
Une autre approche est à l’étude depuis 2022 : elle consisterait à prélever des lymphocytes T CD8+ à des patients non-contrôleurs pour les reprogrammer de manière à ce qu’ils acquièrent les mêmes capacités que les cellules des patients contrôleurs. Les lymphocytes reprogrammés sont ensuite réinjectés aux patients avant une éventuelle interruption de traitement. Le but est d’obtenir ainsi une rémission de l’infection par le VIH, comme observé chez les patients contrôleurs.
Un vaccin thérapeutique est utilisé pour stimuler le système immunitaire d’une personne malade, afin de l’aider à lutter contre sa maladie. Dans le cadre de la lutte contre les infections à VIH, la mise au point d’une telle approche poursuit deux finalités :
Ce deuxième objectif est ambitieux. Il nécessite le recours à des stratégies thérapeutiques complexes dont le vaccin thérapeutique n’est qu’une des composantes. L’idée actuellement développée consisterait à associer différents candidats-vaccins pour optimiser les réponses immunitaires et à les combiner avec des immunomodulateurs.
Un vaccin préventif est administré afin d’éviter une infection. Il s’agit de la meilleure solution pour contrôler et éradiquer une épidémie telle que celle de VIH/sida. Bien que d’autres stratégies de prévention existent (utilisation de préservatif, PrEP), la communauté médico-scientifique s’accorde pour penser que seule une combinaison de ces stratégies avec un vaccin préventif permettra de contrôler l’évolution de l’épidémie.
Mais jusqu’à présent, aucun vaccin préventif (ou thérapeutique) efficace n’a vu le jour.
L’optimisation des conditions de vie des personnes vivant avec le VIH passe notamment par la simplification des traitements et l’allègement des stratégies thérapeutiques, en particulier pour les patients dont l’infection est bien contrôlée.
Une bithérapie est désormais proposée, à la place d’une trithérapie, à de nombreux patients chez qui l’infection est contrôlée : elle permet de réduire le nombre de médicaments pris chaque jour.
Encore mieux, avec la bithérapie injectable à libération prolongée l’ensemble du traitement est délivré par injection intramusculaire une fois tous les deux mois. Cette modalité est proposée à des personnes vivant avec le VIH qui répondent à des critères stricts, et pour lesquelles la charge virale est contrôlée depuis plus d’un an. Le traitement est initié en milieu hospitalier pour assurer une surveillance rapprochée de son efficacité. Une administration en ville est ensuite possible. D’autres traitements à libération prolongée montrent des résultats prometteurs et sont en cours d’étude.
Pour répondre aux problématiques d’accès au diagnostic, l’ANRS MIE s’est engagée avec le projet Makasi à renforcer la capacité des personnes issues de la communauté afro-caribéenne, nées à l’étranger et vivant en Île-de-France, à agir sur leur propre santé. Des entretiens motivationnels ont été engagés dans la rue dans le but d’écouter ces personnes, de faire un bilan de leur santé sexuelle, de leur faire connaître et utiliser les ressources sociales et de santé disponibles et, finalement, les orienter vers les services de santé adéquats. Un ouvrage collectif relatant cette expérience de recherche a été publié en 2023 (« Vers l’empowerment en santé : recherches communautaires autour du projet Makasi »).
L’ANRS MIE a en outre soutenu divers programmes de recherche pour mieux comprendre les barrières à l’utilisation des différentes méthodes de prévention et identifier de nouvelles approches de dépistage, notamment pour dépister plus précocement l’infection. Le programme MémoDépistages, mis en place en collaboration avec Santé publique France, a démontré l’intérêt d’une offre de dépistage (avec rappel régulier) du VIH, du VHB, du VHC et d’autres IST se fondant sur l’utilisation d’un kit d’auto-prélèvement à domicile. Le projet NotiVIH devraient quant à lui permettre d’en savoir plus sur l’efficacité d’une « assistance » à la notification aux partenaires par les personnes qui viennent de découvrir leur séropositivité au VIH, l’idée sous-jacente étant de permettre aux partenaires notifiés d’être dépistés le plus précocement possible.
Les chercheurs s’intéressent à ces cas de patients « contrôleurs » post-traitement pour tenter d’identifier des facteurs qui permettent de garantir l’absence de rechute en cas d’interruption de traitement (étude ANRS Visconti, étude ANRS RHIVIERA 01). Ils estiment qu’environ 10 % des patients pourraient être concernés. Les premières données suggèrent que ces personnes présentent spontanément peu de réservoirs viraux grâce à une immunité innée particulière. Chez des patients contrôleurs post-traitement de l’étude Visconti, la rémission observée serait probablement liée à la présence d’une nouvelle famille d’anticorps neutralisants à large spectre. Dans l’étude ANRS RHIVIERA 02 (lancée en 2023), les patients dépistés de manière précoce reçoivent un traitement antirétroviral classique ou une immunothérapie qui comprend deux anticorps neutralisants à large spectre pour tenter de reproduire ce phénomène. Après un an, ce traitement sera arrêté, l’objectif étant de voir si les patients auront un meilleur contrôle du virus et s’ils sont devenus des « contrôleurs post-traitement ».
Plus de 5 000 personnes sont suivies au sein d’une quinzaine de cohortes coordonnées par l’ANRS MIE. Elles permettent aux chercheurs de travailler sur le virus, d’étudier l’évolution de la maladie ou encore de tester des stratégies thérapeutiques. Citons par exemple la cohorte Codex, constituée de « contrôleurs du VIH », infectés par le virus mais dont l’organisme contrôle spontanément l’infection sans aucun traitement.
Une meilleure connaissance de la formation des réservoirs viraux dans les heures qui suivent l’infection permet d’envisager de nouvelles approches pour les éliminer. Ces réservoirs de virus latents persistent à vie dans des cellules immunitaires infectées.
L’ANRS MIE a mis en place plusieurs études (Doluvoir en 2022, Visconti en 2013) pour mieux comprendre les mécanismes qui gouvernent la formation de ces réservoirs viraux. Une autre piste étudiée par l’essai ANRS Synacthiv consiste à rendre visibles par le système immunitaire les cellules dormantes infectées par le VIH, et à réactiver les virus endormis pour les détruire.
Un essai de vaccin préventif (CD40.HIVRI.Env), réalisé par l’Inserm et l’ANRS MIE, a été lancé en février 2021. Ce vaccin repose sur l’utilisation d’anticorps monoclonaux conçus pour cibler spécifiquement des cellules du système immunitaire qui ont un rôle important dans l’activation du système immunitaire, les cellules dendritiques. Ce candidat-vaccin a induit une réponse immunitaire précoce, importante et durable chez les volontaires qui ont participé à l’étude. Toutefois, ces résultats encourageants ne sont que préliminaires.
Des essais visant à alléger les traitements sont en cours dans le but d’améliorer les conditions de vie des personnes vivant avec le VIH, en particulier pour les patients dont l’infection est bien contrôlée.
L’essai ANRS Quatuor, débuté en 2017 et conduit sur plus de 600 participants, a ainsi révélé qu’une prise du traitement quatre jours sur sept est aussi efficace qu’une prise quotidienne de nouveau chez des patients répondant à des critères stricts.